Notre grand reporter perrotin et d’ailleurs, d’ailleurs, nous fait le grand honneur d’une chronique de “souvenirs de gosse”. Les illustrations sont issues des trésors de Michel Jack auquel La fargussienne et ses lecteurs du monde entier adressent un chaleureux M.E.R.C.I !
Souvenirs de gosse (20)
Que vous dirais-je ? J’ ai tellement fait de bêtises dans ma turbulente jeunesse que je ne sais plus par quel bout continuer. Bon ; que diriez-vous si je ne parlais pas de mes « quatre cents coups », mais d’une petit histoire de campagne ? D’accord ?
Allez, comme dans beaucoup de fermettes ou de grandes maisons campagnardes, il y avait un jardin qui produit de bons légumes, mais aussi de moins présentables, alors il y a aussi une basse-cour avec des poules, des canards et aussi des oies. Ces petites bêtes mangeaient les surplus de salades, fruits abîmés (pommes, cerises piquetées par les merles ou les étourneaux-sansonnets), feuilles de choux de Bruxelles, nous on mangeait les boutons de ces choux et les poules et les canards mangeaient les feuilles et les trognons : équitable n’est-ce pas ! D’autant plus que nous, après, on mangeait les poules et les canards.
On avait aussi trois ou quatre moutons et une chèvre. Bien sûr, tout ce petit monde ne finissait pas l’hiver, ou du moins ils le passaient au chaud dans la marmite.
Tous les ans, au printemps, Papa achetait un porcelet, pas plus gros qu’un chat de gouttière et qu’il mettait dans une cabane à cochon, on dit une porcherie, mais les campagnards disent : une soue, ce qui donne, dans les fermes, le nom de « souillon » à la personne qui s’occupe des porcs (aujourd’hui ce nom qualifie les personnes peu soignées sur elles-mêmes : les cochonnes).
Au début de l’hiver, peu avant la Noël, le petit porcelet, à force de manger les restes de la table, les légumes abîmés et diverses pâtées, était devenu un gros porc atteignant honorablement les cent kilos. Il n’y avait plus qu’une alternative, le préparer pour que nous puissions passer l’hiver. En clair, le commis de la boucherie passait la journée à la maison pour dépecer l’animal, après l’avoir assommé et saigné quand même. Notre boulot consistait à battre le sang avec un peu de vinaigre, puis laisser Maman le remiser au frais. Après que le boucher avait brûlé les soies de la bestiole, on devait le gratter avec une boite à « pilchards » dont on avait perforé le fond avec un clou pour en faire un grattoir. Pendant que le boucher et Papa découpaient la carcasse, nous on épluchait les oignons et les larmes coulaient abondamment…
Papa mettait les morceaux dans une grande jarre de terre cuite avec du sel : une couche de sel, une couche de porc et ainsi de suite jusqu’à ce que le pot soit rempli. Les épaules et les jambons se retrouvaient suspendus dans le fumoir. Papa qui nous emmenait couper du bois en hiver (le garde forestier attribuait, contre paiement bien sûr, une coupe de bois aux particuliers qui en faisaient la demande) avait gardé des sciures de divers arbres coupés qui elles, en brûlant lentement, fumaient les morceaux de cochon (oui, à la campagne on dit plus souvent cochon que porc). Alors venait l’essentiel de la journée : la confection et la dégustation du boudin, moment de fête qui était notre repas du soir, pensez donc, déguster (nous on disait se goinfrer, mais faut pas choquer les Citadins) trente centimètres de boudin chaud chacun, une aubaine qui n’arrivait qu’une fois dans l’année.
À suivre…
mmmm je m’y croirais… Déguster le « sanquet » des poulets, de gaver de boudin frais, mais c’est quand qu’on fait ça MJM ????
Ben ma foi je ne sais pas quelle serait la réaction de mes voisins si j’élevai un cochon sur le palier ou même sur mon petit balcon ?
MJM